Variations sur l’équité
Par quel bout aborder la pertinence du travail du RQD pour rallier le plus de monde possible à l’approche du traditionnel Rendez-vous annuel des membres? En passant en accéléré le film trépidant des 12 derniers mois, un fil rouge apparaît. Un thème qui le rythme et sous-tend la grande majorité de nos actions, de nos travaux et de nos échanges: le besoin d’équité. Revue de l’année et des iniquités au fil des quatre saisons.
L’automne dernier a été marqué par un débat sur les successions qui a fait ressortir le désir déjà exacerbé d’une répartition plus équitable de la richesse entre les générations. Présenté caricaturalement, tandis que les plus vieux défendent la préservation des acquis et le droit de finir leur carrière dans la dignité, les plus jeunes réclament leur part du gâteau et les générations intermédiaires pointent l’anémie caractérisée dont elles souffrent. À l’évidence, on manque de ressources pour sustenter tout le monde. Mais ceux qui tiennent les cordons de la bourse ont généralement d’autres préoccupations et priorités, comme en témoigne le discours du premier ministre à l'occasion du tout récent remaniement ministériel.
Soucieux de satisfaire aux désidératas des générations montantes, le Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ) annonce que le critère d’historicité disparait de ses grilles d’évaluation. Désormais, argent supplémentaire ou pas dans ses coffres, 25% de ses crédits destinés au fonctionnement des organismes seront réservés à de nouveaux joueurs. S’ils veulent tirer leur épingle du jeu, les anciens auront intérêt à se mettre à la page et, si possible, à l’heure du numérique. Et si l’un d’eux quitte le circuit, rien ne garantit que les deniers dont il bénéficiait retomberont dans l’escarcelle de la danse. Une conception de l’équité qui nourrit l’inquiétude tout autant que l’espoir.
L’hiver a débuté avec la grande course aux subventions de fonctionnement dont les résultats ne seraient prononcés qu’à l’été. En février, une cinquantaine d’associations et de regroupements exprimaient leur ras-le-bol de voir les représentants des arts et de la culture tenus à l’écart des décisions en matière d’emploi et de formation continue. De cette action allait naître une coalition – baptisée La culture, le cœur du Québec – qui se bat pour qu’artistes et travailleurs culturels jouissent des mêmes droits et avantages que la main-d’œuvre des autres secteurs. À commencer par des conditions socioéconomiques décentes pour tous et toutes.
Avec le printemps et le dévoilement du budget du Québec, on a appris avec stupéfaction que, malgré la période décisive d’évaluation quadriennale au CALQ, la société d’État ne disposerait pas des 40 M$ supplémentaires réclamés depuis près de 10 ans. Il a fallu descendre dans la rue, piquer l'attention des médias et de l’opposition officielle pour que le ministère de la Culture et des Communications (MCC) dégage un petit 4 M$, agrémenté de 3,2 M$ ponctionnés dans l’enveloppe spéciale qui venait d’être attribuée à la création jeune public pour cinq ans. Promesses envolées, espoirs déçus, frustration grandissante.
À l’été, les actions de ces coalitions ont finalement porté fruit, le MCC ayant consenti à mettre en place des comités de travail avec une trentaine d’associations et de regroupements pour inspirer le plan d’action de sa nouvelle Politique culturelle. Pleinement engagé dans ces combats où l’on a aussi défendu, par toutes sortes de travaux et interventions, l’importance capitale du lien entre culture et éducation, le RQD est également intervenu pour une plus grande présence de la danse à l’école.
L'organisme a aussi œuvré pour d’autres formes d’équité. Entre les activités de formation favorisant le codéveloppement ou le partage des pouvoirs dans les processus de création et la publication d’une trousse contractuelle, le RQD a offert des outils pour favoriser de meilleures relations professionnelles. Il a manqué de temps pour s’engager dans une coalition pour une meilleure équité pour les femmes en création, dont il s’était rapproché. Il n’a fait qu’amorcer, faute de moyens, des discussions avec le Centre de ressources et transition pour danseurs et avec l’Union des artistes pour la création d’un groupe de travail pour lutter contre le harcèlement psychologique et sexuel dans le secteur de la danse. Enfin, il est en train de rassembler les membres de son nouveau comité Inclusion et vivre-ensemble pour s’attaquer, entre autres, aux questions de racisme systémique et d’appropriation culturelle.
De tout cela, et de bien d’autres choses, nous parlerons au RDV annuel des membres des 27 et 28 octobre prochains, où sera élue une nouvelle présidence et où sera mise en jeu la notion de valorisation de la danse. Venez! C’est important.
Fabienne Cabado
Directrice générale du RQD